
Paris vu par le cinéma

"Un américain à Paris" de Vincente Minnelli
États-Unis, 1951, 1h53, couleur, avec Gene Kelly, Leslie Caron, Oscar Levant...
"Un Américain à Paris" de George Gershwin, (extrait).
Synopsis
Installé à Paris, Jerry Mulligan, peintre américain, peine à vivre de son art. En voyant ses toiles exposées dans la rue, une milliardaire tombe amoureuse de lui et décide d'être son mécène. C'est alors qu'il rencontre Lisa, une jeune Française dont il s'éprend, sans savoir que celle-ci est déjà fiancée à Henri Baurel, l'un de ses amis ...




Analyse d'un extrait vidéo
Le bal final tant attendu est une déception autant pour le spectateur que pour Jerry Mulligan qui découvre que celle qu'il aime est en réalité promise à son ami musicien. Il se perd alors dans une rêverie mélancolique...
Le ballet final d'un Américain à Paris est sans doute la scène la plus marquante du film. Elle résume l'intrigue amoureuse entre Leslie Caron et Gene Kelly sur la musique dansante de Gershwin. Minnelli a été forcé de filmer ce qui fut un des plus longs ballets jamais tournés (18 minutes) dans les studios de la MGM en Californie, faute d'autorisation nécessaire. Loin d'embarrasser l'ancien peintre et décorateur, il intègre ainsi des références aux peintres qui ont représenté Paris: Dufy, Toulouse-Lautrec, Utrillo ou encore Van Gogh. Les décors factices assumés, le travail de la lumière et des couleurs rappelant celui des Fauves et Impressionnistes. Les tableaux prennent vie et deviennent décor de la danse de séduction.
Paris, capitale des arts
Vincente Minnelli signe ici une comédie musicale, genre auquel il excellera tout au long de sa carrière en alliant un casting de premier choix: Gene Kelly, à l'écran dans le rôle de Jerry Mulligan, mais aussi derrière la caméra comme réalisateur des scènes de ballet et Leslie Caron qui fait ses premiers pas au cinéma à tout juste 20 ans. S'ajoute la musique de Gershwin qui rythme le scénario et tous les ingrédients du succès sont réunis dans ce film qui recevra 6 Oscars en 1952.
Une image de Paris fondée sur les fantasmes du réalisateur est façonnée dans le film. D'abord, la vie de bohème que mènent les personnages dans un Paris village, de carte postale. Jerry Mulligan qui fait des claquettes avec les enfants du quartier qui réclament à grand cri du "bubblegum", les rencontres des deux artistes au café du coin, la déclaration d'amour sur les quais de Seine, symbole du romantisme parisien, tous ses éléments participent à la création d'un Paris imaginaire, poétisé. Néanmoins, cette vision idéalisée de la ville n'exclut pas une certaine mélancolie qui plane sur les nombreuses réalisations de Minnelli. Les rêveries de l'artiste, dont il ne semble pas pouvoir se sortir, sont en fait des illusions qui masquent son impuissance face à la réalité de sa situation: un avenir incertain dû à sa condition d'artiste indépendant, une idylle impossible. Le rêve demeure alors la seule évasion possible.
Le cinéma, la peinture, la danse et la musique se mêlent, autant dans la réalisation du film (voir analyse) qu'au niveau de l'intrigue. Jerry Mulligan, archétype du peintre bohème et mélancolique trouve refuge dans la Paris, ville des artistes, propice à la création. Accompagné de son ami Henri Baurel, pianiste, il s'éprend de la jeune danseuse Louise Bouvier. Chaque personnage représente une forme d'art. Ce film constitue donc un véritable hommage à l'art français dans tous ses domaines d'expression.
Minnelli construit donc une image de Paris fidèle aux clichés distillés par l'industrie du cinéma hollywoodien sans pour autant abandonner toute profondeur puisqu'il use de toutes les formes d'art caractéristiques de la capitale pour la transposer en cadre onirique et rêvé pour l'histoire d'amour riche en rebondissements de Louise Bouvier et Jerry Mulligan.